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Le journal de mamie Paulette : 3 août 1942

sommaire du journal

Chartres – La Loupe – Rémalard = 59 km     Total = 174 km

Après un sommeil en fanfare – chants des allemands, horloges multiples de la ville répétant chacune l’heure – nous nous levons à 6h1/2 et partons à 7h1/4. Cette fois aucune crevaison. Après le tour de la Place Marceau nous prenons notre route qui était d’ailleurs la rue de notre hôtel.

Tout de suite quelques gouttes de pluie mais s’arrêtant aussitôt. Dès Landelles, nous surplombons un paysage de jouets : petites maisons au toit rouge, petits arbres, petites vaches dans les prés et petite rivière. Nous qui ne connaissions plus que les plaines de la Beauce, nous admirons et regrettons de n’avoir pas d’appareil photographique.

Nous ne nous arrêtons pas pour si peu. A Lucé nous récoltons du blé barbu (?) et de l’avoine blanche. La route continue mais dans les champs de blé on voit déjà quelques pommiers. Nous rentrons dans Courville où nous voudrions trouver un café car il ne fait pas chaud sur la route où la pluie reprend. Tous sont fermés. On nous en indique 1 au bout du pays, mais il est fermé comme les autres. Nous n’avons que le temps de nous abriter chez un maraicher pendant qu’une pluie sérieuse cette fois, tombe. Nous sortons nos impers.  J’enfile le mien et comme la pluie s’arrête nous repartons, passons par le centre de la ville où nous achetons des prunes.

De Courville vers Landelles et Pontgouin (voir plus haut). Comme à l’entrée de Pontgouin nous voyons à droite un château nous nous y dirigeons et n’avons que le temps de nous abriter sous la grande porte pour laisser passer la pluie encore une fois. Revenues à Pontgouin, nous traversons la ville, en sortons et n’avons encore une fois qu’à nous mettre à l’abri sous un pont de chemin de fer. C’est un abri précaire et les trains qui passent sur notre tête secouent tout. La pluie n’arrête pas. Il est 10h20 et nous décidons d’abord de partir à 11h1/2 même s’il pleut toujours. Cependant, lassées d’attendre, nous quittons la place à 11h moins le quart et partons pour La Loupe à 9km sous la pluie, déguisées toutes deux en capucins. (effet comique)

Bien nous en prend. Arrivées à La Loupe, on nous indique un restaurant catégorie D. Nous y arrivons trempées à 11h1/2. Il est complet !!! Quelle déception ! Nous en trouvons deux autres catégorie C et choisissons l’un pour le lapin indiqué sur le menu. Nous y entrons et sommes les dernières acceptées. Nous garons nos vélos sous un hangar. Nous sortons nos chaussures car nos pieds nus sont trempés et l’un de ceux de Jeannine s’est agrandi de quelques pointures. Nos imperméables s’égouttent dans la salle du restaurant. Nos nus-pieds sèchent le long du mur et nous attendons le service.

Voici le menu affiché : Potage / lapin / céleris / salade / fruit
Voici le menu mangé : radis au beurre / boeuf carottes / céleris / salade / gâteaux secs + café

Le café remplaçant le potage qui nous aurait fait bien plaisir.

Tout est bien bon, bien gras et nous buvons les sauces avec la cuillère du plat pour ne perdre aucune matière grasse. Pendant le déjeuner un rayon de soleil est venu et nous a déjà enlevé notre idée de rester coucher à La Loupe.

Sorties de table, nous astiquons nos vélos. Remontons nos bagages, passons nos pieds-nus dans les courroies de façon à ce qu’ils sèchent au vent de la route.
Et nous repartons sous le soleil. Pourtant je garde le manteau rouge car depuis ce matin 5h, les Anglais sont là !
Heureusement qu’avant La Loupe nous avons glané du blé roux qui faisait tant envie à Jeannine par sa rareté et qui d’ailleurs est encore sur tige dans bien des champs, car maintenant nous ne verrons plus une seule céréale. Nous sommes dans un pays accidenté, vallonné presque autant que certaines régions des Vosges, couvert de prairies, semé de pommiers sous lesquels ruminent de paisibles vaches. Avec le ciel maintenant bleu, la route montante puis descendante, nous pouvons bien admirer les jolis paysages qui s’offrent à nous. Dès La Madeleine nous trouvons les portes campagnardes coupées en deux à mi-hauteur.

Des Les Moutiers nous sommes dans la forêt ; et comme la route monte toujours nous trouvons sous les branches d’un sapin le point de vue annoncé sur la carte. Mais au loin le ciel est bas et il doit pleuvoir. Au-dessus de notre tête les nuages passent. Le vent qui souffle à nouveau dans notre figure les chasse derrière nous. Cependant près d’une scierie, nous n’échappons pas à la pluie mais des chênes nous abritent si bien que nous n’avons pas besoin de mettre nos imperméables. Nous repartons à toute vitesse vers Rémalard et d’ailleurs les côtes qui maintenant descendent nous aident bien.

Nous arrivons à Rémalard à 4h1/2 sous la pluie qui recommence. On nous annonce qu’il n’y a qu’un hôtel et qu’il est sûrement complet. Nous y allons pourtant. Quel soulagement ! nous avons une chambre et avec eau chaude courante … et au même prix que partout ailleurs. Nous nous installons, mettons nos robes, partons faire un petit tour en ville (visite d’une petite église) et revenons chez nous. Jeannine tricote. Nous buvons notre 1er cidre.

Temps : actuellement le soleil est magnifique
Etat de santé : excellent

Là aussi, il y a dû avoir des bombardements – mais aucun occupant.

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