Baptême de vélo-sacoches par Evelyne

La doudouce, c’est son premier séjour en vélo-sacoches, une randonnée itinérante d’une semaine en Ligurie occidentale. Pour elle, c’est une belle promesse avec plusieurs inconnues : tenir le coup avec un vélo chargé, même si elle a réduit au minimum (soit 4×2 kgs) ses bagages, tenir le coup quotidiennement dans la durée, sur plusieurs jours (elle a peur des crampes et tout un tas d’autres craintes), faire connaissance avec une quinzaine de personnes (bien sûr elle est avec son doudou, elle connaît un peu Jules, elle a croisé les Jacques, les Bernard, Daniel et Joëlle, Christine, Christian, Jo et Jeannot…) mais Denis, Zoé, Pascal, Marik, elle ne les a jamais vus. Et surtout, l’esprit d’un groupe de vieux compères, qui ont roulé leurs bosses sur les chemins de France et de Navarre, elle ne sait pas ce que c’est.

Pour un séjour sportif, ça s’engage plutôt bizarrement au refuge de la Pavoncella à Camerana, ambiance gauchos et ranch, vino rosso servi en perfusions par tout un système de tuyauteries qu’on ouvre à volonté…

Mais le lendemain, le soleil brille, on pédale tranquillou en ribambelle, jusqu’à la montée du kilomètre 15.

Là, la doudouce qui aime les surprises, en a une de taille : un vrai raidar (d’ailleurs elle ignorait tout de ce concept). D’aucuns annoncent 16%, d’autres poussent à 20%. Peu importe, à force de zigzags, on en réchappe et quand on atteint Scagnello à 748m, avec quelques gouttes de pluie, une pâtisserie providentielle, genre vieilles dentelles sans arsenic, nous offre tables et hospitalité.

A Calizzano, Jules et Jacques C. qui n’en ont pas assez, repartent pour 20km et un col sur la ligne de partage Méditerranée/Adriatique.

Et le soir, tout le monde découvre les menus à l’italienne avec un incontournable plat de pâtes pour antipasti (on goûtera selon, lasagnes, ravolis, spaghettis carbonara ou bolognese, gnocchis…) suivi de fines tranches de viande et d’une poignée de pommes frites, avec ou sans dessert, avec ou sans vin. Côté glucides lents, ça fonctionne puisque chaque matin, chacun enfourche sa bécane dans la bonne humeur.

Après des courses matinales (sans respecter tout à fait les 3 personnes consenties ensemble dans un rayon de pasta), on s’attelle à la montée du col de Melagno dans une splendide forêt de hêtres. Et de songer aux bûcherons italiens émigrés avant- guerre pour transporter leur savoir-faire en zones frontalières…

La pluie nous guette quand Daniel propose une halte dans un providentiel restaurant. On s’y attarde plus que de raison, on laisse à Jules le temps d’apprécier une assiette de profiterolles, avant qu’une légère accalmie permette de repartir. Et là, la doudouce découvre une incroyable panoplie de cyclistes-scaphandriers-cosmonautes avec d’élégantes capes coccinelles à pois blancs, la charlotte fluo pour casque de Pascal, les gants de vaisselle de Joëlle, les cuissardes jaunes de Christine et Christian et le garde-boue sur mesure découpé par le doudou. Elle apprend qu’en vélo, le noir est proscrit, il faut du flash, du réfléchissant ! On emprunte un sensible raccourci et on atteint ainsi Savone et la riviera dans les senteurs de jasmin.

Le 3ème jour débute en front de mer, le long des plages bien ratissées et des transats bleus parasol, entre les tunnels piétonniers et les hôtels désuets. On se prend à rêver un goût de paresse et de vacances. Ce serait sans compter avec la perspective du col de Turchino plein de replats faux-amis, que chacun empoigne avec un petit plateau. Le vent se lève, pas âme qui vive, on pique-nique debout et chacun repart au plus vite. On n’est pas au bout du chemin de croix puisqu’il reste à grimper le col del Faiallo s’achevant par une route en corniche d’où l’on est sensé voir la grande bleue. Pour l’heure, c’est sous une pluie battante, dans la solitude glaciale du brouillard que chacun s’achemine à son rythme jusque 1050m. On décide de descendre au plus vite par petits groupes, dans les chaos, les trous et les gondoles jusque l’hôtel Minetto à Martina d’Olba. Chapeau à Denis qui assure son rôle de serre-file avec constance, à Bernard qui tire sa carriole et son drapeau-girouette, à Zoé qui retrouve les gants perdus… Après les douches chaudes à souhait, la bière coule à flots, comme l’aperol spritz. Ce soir, les langues se délient, chacun raconte et raconte encore des émotions de guidons, Jeannot fait l’unanimité quand il résume on a reçu…

Journée- repos à Martina, un banc géant et un cœur s’affichent comme une spécialité des belvédères italiens. Plus loin, une épée colmatée sur un rocher nargue l’église. Rien de bien inspirant. Jacques W., Pascal et Bernard V. fuient l’ennui en partant pédaler. Coinche et belote dorent les temps morts et font jaillir quelques bonnes parties de rigolade. Heureusement la météo devrait s’améliorer. D’ailleurs c’est une vérité : quand on a connu le baromètre au plus bas, il ne peut que remonter !

Une 4ème journée sans histoire, avec un restau kitch au moment où on sortirait presque les capes. Une étape presque trop courte, si bien que la bande des six s’offre un extra roulant à souhait. Juste pour se mettre en appétit car le menu gastronomique de l’hôtel Pian del Sol à Sassello laisse tout le monde pantois. Fabuleux mariage de couleurs et d’arômes qui nous conduit bien au-delà des 21 heures du coucher habituel. Et comme on n’est pas sûr de pouvoir repartir demain ni même dormir le ventre si plein, certains s’offrent une vraie soirée de noctambules à la découverte de ce joli bourg, incontestablement point le plus touristique du périple.

L’avant-dernière journée, le doudou reprend ses droits en enfourchant le Cannondale et cède l’électrique à la doudouce. Celle-ci appuie fort pour ne pas perdre des barrettes mais c’est raté, elle ne rendra pas le vélo intact alors elle taquine cruellement Jo qui termine en tête dans toutes les côtes. On descend sur les faubourgs de Cairo Montenotte, une vieille cité ouvrière qui ne fait pas rêver, pas plus que l’hôtel city qui n’accepte sans doute pas les chiens mais les vélos pour compagnons dans les chambres. Ca sent la fin de la rando-sacoches, on parle déjà du retour. Pourtant la dernière journée sera croustillante avec quelques emballements de descendeurs étourdis qui devront remonter 2,5 km de macadam. Au col, on se sépare, la trace c’est la trace, même quand elle conduit sur des chemins de terre et de flaques (il a dû pleuvoir par ici aussi).

 

Moment de doute pour la dernière “cattinade” du séjour, sans Daniel bien sage sur le coup …

D’autres choisissent une route fleurie et tout le monde de retrouver une tenue légère et son cabriolet.

Et la boucle fut bouclée

Plutôt arrosé pour un baptême, mais il faut de l’eau pour apprécier le soleil, quelques douleurs dans les mollets pour jouir de la brise quand on dévale à toute allure, surtout des accolades et des rires pour rester jeunes.

Car au CTG, en vélo-sacoches, on aime la vie !

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