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Le journal de mamie Paulette : 11 août 1943

sommaire du journal

Angoulême – Voeuil – Montmoreau – Montboyer – Chalais = 46 km      total = 148 km

Ce matin lever à 7h1/2. Nous trainons pour attendre l’heure d’ouverture des magasins. En effet, Jeannine a trouvé une paire de chaussures à son goût chez André, et toutes deux une chemisette qui nous fait bien envie. André ouvre à 10h. Les chemisettes à 10h1/2. Nous parcourons donc encore une fois la ville, offrant le spectacle de nos cuisses à qui les remarque encore – Et elles sont remarquées !..

S’il n’y a pas de barrettes chez les coiffeurs, il y a des fruits et des légumes – sans tickets évidemment – Nous ne nous contentons pas de les regarder, ni d’en acheter, mais nous allons encore faire le tour du marché pour voir comme il est achalandé. On y fait la queue pour des mange-tout, mais certainement tout le monde en aura.

Chez André, les chaussures n’existent qu’en vitrine – comme de juste ! – Chez le chemisier nous faisons affaires. Jeannine sort avec une chemisette en échange de 12 points. Pénétrée de regrets à l’idée de rater la mienne pour 6 points, j’y retourne seule et on m’en offre autant que je le veux et sans point. De quoi s’y ruiner quoiqu’on ne m’augmente pas les prix. Mais je résiste et je sors du magasin fière comme Artaban avec ma chemisette. Les grosses dépenses suffisent.

Il est 11h1/4 quand nous quittons Angoulême et nous n’allons pas d’un train d’enfer. D’ailleurs la route monte et descend d’une façon extraordinaire et nous n’y sommes guère encore habituées. Enfin et surtout nous ne pensons qu’à nos chemisettes et nous nous arrêtons dans une montée. A tour de rôle nous nous déshabillons sur la route et enfilons notre acquisition. Quel plaisir ! Personne ne nous a dérangées et chacune trouve l’autre à son goût. Nous pouvons reprendre la route, mais nous n’avançons guère. Les mûres des talus sont délicieuses, les montées assez longues. Souvent nous quittons la selle de nos vélos.

A midi, nous traversons un trou de quelques maisons … Voeuil …  Alors que nous pensions déjeuner à 30 km d’Angoulême, nous n’en sommes qu’à 8 km. Entrainées par l’élan, nous avions déjà passé les 3 ou 4 maisons quand nous revenons sur nos pas, trouvons un restaurant, y sommes acceptées malgré la peinture fraîche et y mangeons plus que copieusement.

Soupe / Beafsteak / haricots au lard (!!!) / fromage (1/2 camembert maigre) / pommes cuites

Les peintres qui sont là nous parlent. On sent qu’on approche du midi, surtout aux propos de l’un d’eux. Nous héritons pourtant de leur 1/2 fromage et d’un verre de bière.
Nous repartons lestées, et franchissons forces collines. Monter, descendre, descendre, monter, c’est notre route de toute la journée et c’est magnifique. La plupart du temps nous ne pédalons pas car les montées suivant immédiatement les descentes, l’élan de celles-ci nous conduit au moins au milieu de celles-là.

Les mûres sont toujours aussi bonnes (bien meilleures qu’à Orsay) mais aux ruisseaux que nous croisons, nous comprenons que nous ne nous baignerons autrement pas ce soir.

Avant Chalais, nous trouvons le long de la route des petits jardins qui nous font penser aux barrières de Paris.
A Chalais, c’est dans un hôtel en réfection que nous arrivons. Mais nous y sommes bien…
Nous nous promenons dans la ville, faisons le tour d’un château-fort, mangeons notre premier melon. S’il n’est pas très sucré cela contente pourtant notre envie car nous en avions déjà lorgné à Angoulême.

Dîner impromptu : Bouillon gras de pot-au-feu / salade de tomates avec huile / 1/2 melon (notre supplément) / Boeuf sauce tripes / salade avec huile / fromage

Nos deux étages sont durs à monter et notre esprit est lent.
Ecrire nécessite un énorme courage.

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